La rémunération des traders (3/3)

février, 5, 2010
Sylvain

Les risques liés au mode de rémunération actuel des traders

Dans ce dernier post (les deux premiers sont ici et ici), j’évoque les risques liés au mode de rémunération actuel des traders (mais pas les risques liés aux montants de ces rémunérations, ces risques étant quasiment nuls). C’est encore dans un article d’Olivier Godechot que nous trouvons une explication raisonnée de ces risques (Godechot, 2008).

Le premier risque est celui de la prise de risque par le trader. En effet, la valeur d’une position dépend largement du risque associé. Pour maximiser son profit le trader va donc être incité à prendre des positions risquées. D’autant plus qu’il n’y a pas de symétrie dans la rémunération du trader : en cas de réussite sur une position risquée, le gain est fort, en cas de réussite sur une position plus sûre, le gain est faible, et en cas d’échecs sur ces deux positions, le gain est nul (mais jamais négatif). Le trader n’a donc aucun intérêt personnel à ne pas prendre de risques forts. En revanche, la société de bourse qui l’emploie est concernée par la symétrie des risques : elle peut perdre beaucoup sur un échec sur une position risquée. Au final, plus le trader va prendre des positions à fort potentiel (pour la société et lui-même), plus la société risque une perte d’actifs. Godechot, 2008, mentionne un autre effet pervers de cette prise de risque, celle de la déformation temporelle : en cas de faible valorisation en fin d’année, un trader va sans doute prendre plus de risques pour tenter de « sauver » son bonus, jouant une sorte de quitte ou double malsain avec l’argent de la société de bourse.

Le deuxième type de risque dû au bonus (et le plus important selon Olivier Godechot) est celui de la modification induite de la représentation comptable. En effet, selon lui la notion même de bonus modifie en profondeur la représentation comptable de l’entreprise. D’une part, à cause de la masse monétaire en jeu, et d’autre part, car l’activité liée au calcul même des bonus (négociation, consolidation, ventilation, etc.) occupe l’organisation pendant toute l’année. Au final, la comptabilité de l’entreprise, polluée par le mécanisme du bonus, ne donne plus une vue sincère et réelle de l’état de l’entreprise. Cela constitue un facteur de risque très important sur les décisions stratégiques que la direction générale peut être amenée à prendre.

Et voilà, je vous laisse méditer sur tout ça sans mettre de conclusion !

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